1jour1actu : Pour combien de jours partiez-vous en mission à bord de votre sous-marin ?

Michel Scarpellini : Nous partions entre 10 et 20 jours, mais parfois beaucoup plus. Quand nous partions dans le Grand Nord, on pouvait passer 45 jours sous l’eau.

C’était quoi, le plus dur ?

Michel Scarpellini : Le plus dur, c’était de ne pas voir le soleil. D’être coupé de la lumière et du monde. Il n’y avait pas de hublot pour laisser le regard s’échapper hors du sous-marin. On était dans une boîte, enfermés.

Et votre plus grand bonheur ?

Michel Scarpellini : Parfois, il arrivait que le sous-marin remonte à la surface. Alors, l’équipage faisait la queue pour sortir de l’habitacle à tour de rôle, avec une attente énorme : celle de prendre une bolée d’air frais. C’était ça, mon plus grand bonheur. Malheureusement, il était suivi d’un moment assez terrible.

Ah oui, et lequel ?

Michel Scarpellini : Nous étions jusqu’à 60 personnes à bord. Et, à l’époque, nous avions très peu d’eau. Il nous arrivait de ne pas nous laver pendant 45 jours. Alors, quand après avoir pris une bolée d’air frais, nous redescendions dans le sous-marin, l’odeur de renfermé et de chaussette nous sautait aux narines.

Quelle est la différence avec le confinement que nous vivons tous actuellement ?

Michel Scarpellini : Quand on fait mon métier, on choisit cette façon de vivre et on est entraîné. Là, personne n’a choisi de vivre confiné et l’immense majorité des gens n’y était pas préparée. Voilà la première différence. L’autre grande différence, c’est que nous avions une mission à accomplir, des exercices d’entraînement à faire. Nous n’avions pas le temps d’être tristes, ou même de nous ennuyer. Du coup, les journées passaient vite.

Quelle astuce donneriez-vous aux lecteurs d’1jour1actu pour bien vivre cette période ?

Michel Scarpellini : Il faut essayer de tenir un rythme. Se dire que de telle heure à telle heure, chaque jour, on fait ceci ou cela. En faisant un planning, on se donne des buts, c’est très important pour le moral. Et, le week-end, il faut faire autre chose, se permettre des petits plaisirs qu’on ne s’autorise pas la semaine.

En parlant de petits plaisirs, comment mangiez-vous à bord des sous-marins ?

Michel Scarpellini : En général, c’était simple mais très bon. Le cuistot avait un grand rôle. Tout l’équipage aimait se retrouver autour d’un bon plat. C’est important pour l’esprit d’équipe. Après, on jouait aux dames ou aux échecs. Ce peut être aussi un conseil : profiter du confinement pour cuisiner, faire des gâteaux. Ça occupe et ça fait plaisir à tout le monde !

Propos recueillis par Catherine Ganet