(© A. Jourdheuil)

1jour1actu : Pour la troisième année de suite, la ville de Saint-Malo a décidé d’interdire la circulation sur la rue des Petits-Ports, jusqu’au 16 mars. Où se trouve cette route ?

Amandine Jourdheuil : La rue des Petits-Ports, à Saint-Malo, est une petite route qui mène vers la pointe de la Varde, une pointe rocheuse en bord de mer. Ce site naturel est très fréquenté par les amphibiens pendant leur période de reproduction. C’est-à-dire entre mi-janvier et fin mars. Ces animaux se retrouvent notamment autour d’une petite mare… qui se trouve de l’autre côté de la route.

Quelles espèces et combien d’animaux peut-on observer autour de cette mare ?

Amandine Jourdheuil : Ce sont surtout des crapauds communs et des tritons palmés qui sont présents ici. Nous n’avons pas encore fait de comptage cette année mais, en 2017, nous avons pu en observer près d’un millier ! En journée, ces petits animaux se cachent dans des terriers, des herbes hautes, des bois, etc. Ils en sortent la nuit et migrent jusqu’à la mare pour s’accoupler et pondre leurs œufs. Ce sont alors des centaines d’animaux qui traversent la rue des Petits-Ports au même moment et sur quelques mètres de distance seulement. Peu de voitures circulent sur cette route à l’écart des zones habitées, surtout en pleine nuit, mais il suffit d’un véhicule pour provoquer un véritable massacre…

À quoi ressemblent le crapaud commun et le triton palmé ?

Amandine Jourdheuil : Le crapaud commun est le plus répandu en Europe et aussi le plus gros. Les mâles mesurent entre 5 et 9 cm et les femelles entre 8 et 11 cm. Assez court sur patte, le crapaud commun se déplace lentement. Lors de leur rencontre pour s’accoupler, le mâle s’agrippe au dos de la femelle qu’il a choisie ! On le reconnaît à son œil orangé et ses nombreuses tubérosités, comme des sortes de bosses, sur le corps. Le triton palmé, lui, ressemble à un petit lézard, à la différence qu’il n’a ni griffe ni écaille. Sa peau est lisse. Ils figurent tous les deux sur la liste rouge des espèces de vertébrés « à surveiller » en France. Ils font aussi partie de la Liste rouge européenne et mondiale de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), qui identifie les animaux à protéger.

Pourquoi est-ce important de les protéger ?

Amandine Jourdheuil : Le crapaud commun et le triton palmé ne sont pas en danger critique d’extinction, mais leurs effectifs baissent plus vite qu’il ne le faudrait. Or, ces deux espèces constituent un maillon important de la chaîne alimentaire. Elles mangent notamment des insectes dont certains peuvent devenir nuisibles lorsqu’ils sont en trop grand nombre. Ces deux espèces sont elles-mêmes  une nourriture de choix pour certains mammifères. Leur présence contribue donc à l’équilibre biologique de notre environnement.

Combien de crapauds communs et de tritons palmés sont sauvés grâce à la fermeture de la route ?

Amandine Jourdheuil : Difficile de le savoir précisément. Ce qui est certain, c’est que l’on évite une forte mortalité due au trafic routier. Les années passées, on a pu constater de nombreuses pontes dans la mare après la fermeture de la route. Un bon signe !

Propos recueillis par Stéphanie Biju

Amandine Jourdheuil est chargée de mission environnement pour l’agglomération de Saint-Malo.